Quand on est seuls on est toujours dérangés [pv Matthew A. Carter]

Cela faisait déjà plusieurs heures que Lisbeth avait quitté son amour. Elle lui avait malheureusement promis avant de partir qu'elle ne toucherait plus ni à l'alcool, ni aux drogues, ni aux médicaments. Le sevrage était pour l'instant loin d'être facile et elle broyait bien évidement du noir. Elle pensa à sa vie et se dit qu'à part Alex, c'était un vrai désastre. Elle avait fini par accepter le fait que les médicaments et la drogue la tuaient à petit feu. Pour l'instant, Lys était entendue sur son lit, la chambre vide, noire. Elle contemplait sa sacoche jetée dans la poubelle avec admiration, se rappelant de l'effort qu'elle avait dû faire pour ça. Elle tourna la tête et regarda la bouteille de rhum qui gisait près de l'évier, complètement vide. Elle tourna la tête de nouveau et fixa le plafond.

Quelques minutes plus tard, alors qu'elle se battait intérieurement pour ne pas prendre la sacoche, elle se leva lentement et s'approcha du lavabo. Elle passa son visage sous l'eau puis se remaquilla rapidement. Elle regarda son reflet dans la glace et se dit qu'elle faisait vraiment peur. Les cernes qu'elle avait la vieillissait d'au moins dix ans et son visage tiré par la fatigue n'arrangeait pas le portrait. Lisbeth s'écarta de la glace rapidement, se dirigeant vers son armoire. Elle saisit un Jean noir ainsi qu'un décolleté légèrement plongeant puis passa des talons et sortit de la chambre.

Elle resta sur le pas un moment se demandant où aller. Elle hésita entre aller vers la chambre où elle avait agressée cette femme pour s'excuser. Elle écarta rapidement cette possibilité en se disant que la demoiselle appellerait sûrement la police. Elle choisit l'autre option qui s'offrait à elle, aller dans un coin désert de l'université. Elle choisit la bibliothèque, ceci étant l'endroit où on risquait le moins de la trouver. Lilly se dirigea donc vers la salle. Elle parcourut les différents couloirs la tête plutôt baisse, marchant de la manière la plus discrète possible pour que personne ne la remarque.

Elle arriva devant la porte et l'ouvrit doucement. Elle constata à son grand soulagement que l'endroit était désert. Elle rentra rapidement puis referma la porte et chercha s'il n'y avait pas de bibliothécaire. Par chance, il était en pose ou quelque chose du genre. Lisbeth s'installa à la table qui était le plus à l'écart et posa sa tête sur le bureau. Elle rêvessa quelques instants et ne se releva qu'en entendant la porte s'ouvrir. Elle soupira et espéra que la personne ne viendrait pas au fond des différents rayons.

Invité

Matthew en avait plus que marre. Allongé sur son lit, il contemplait le plafond d'un air absent, essayant de retarder le plus possible le moment où il devrait aller à la bibliothèque. Un prof l'avait vu en train de taper un élève, et avait voulu lui donner une punition exemplaire. Ce n'était pas de sa faute si l'élève l'avait poussé à bout et de plus, qu'il avait un caractère impulsif. Il soupira une énième fois, regardant sa montre. Le prof, au lieu de lui donner quelques heures de colle et des jours de renvois dont Matthew se fichait comme de ses premières chaussettes, lui avait dit qu'il assisterait le bibliothécaire pendant un mois, quelle joie..

Il regarda encore une fois sa montre, puis se leva, remarquant que c'était l'heure. Le jeune homme s'approcha du miroir de la salle de bain, remettant quelques mèches de cheveux blonds en bataille, adorant se donner un look décoiffé puis mit ses baskets et sortit de la chambre. Il traversa les couloirs déserts, avec comme seul bruit le frottement de ses chaussures sur le sol. Il ne pensait pas pouvoir tomber plus bas dans l'humiliation, travailler à la bibliothèque, quelle honte.. Il poussa doucement la porte de la salle et rentra, remarquant qu'il n'y avait presque personne à part le bibliothécaire. Cela ne le surprenait pas trop, lui-même préférant sortir dans le parc par une si belle journée plutôt que de s'enfermer ici. Il salua l'homme d'un signe de tête puis lui demanda ce qu'il devait faire. Celui-ci lui dit qu'il devait aller chercher des bouquins à la réserve et les mettre dans les rayonnages pendant qu'il allait se chercher un café. Comme toutes les fins d'après-midi, c'était pareil. C'était toujours lui qui devait se taper le sale boulot pendant que l'autre allait boire un café et discutait avec le personnel pendant des heures. Finalement, Matthew avait fini par si faire, trouvant que c'était mieux ça que d'entendre le biblio lui hurlait dessus tout le temps.

Lorsqu'il ressortit de la réserve, les bras chargés de livres, Matthew se dirigea vers la bibliothèque où il remarqua que la porte était légèrement entre-ouverte. Il était pourtant sûr de l'avoir fermé derrière lui. N'y faisant pas plus attention que ça, il retourna derrière le présentoir et déposa tout les ouvrages. Il en attrapa ensuite deux ou trois puis s'approcha du dernier rayonnage, où il devait les mettre. Lorsqu'il arriva à la hauteur de la dernière étagère, Matthew remarqua une jeune femme assise sur une chaise, en train de rêvasser. D'une voix qu'il voulut calme, après s'être assis en face d'elle et poser tout les livres sur la table, il lui dit:

- " Heuu, salut ... Tu sais que tu n'as pas le droit d'être là ? La bibliothèque est fermée normalement ...
Enfin, tu peux rester là, moi ça ne me gêne pas, mais faudra pas que tu te fasses choper par le biblio ... Il est de sale humeur aujourd'hui. "

Les pas qu'entendait Lisbeth se dirigeaient malheureusement vers le bout de la bibliothèque, exactement là où elle était. Elle soupira légèrement. Elle n'aimait pas qu'on la voit dans cet état, le visage légèrement bouffi, tiré par la fatigue et les quelques heures de plaisirs qu'elle avait eu avant. Ces yeux étaient aussi légèrement rouges, bien qu'elle n'ait pas pleurer. Elle regarda la personne rentrer sans son champ de vision, un pile de livres dans les bras. Elle vit que c'était un homme et soupira une nouvelle fois. Elle le regarda s'assoir en face d'elle avec attention, essayant de camoufler avec ses mains son visage enflé.

Lisbeth regarda le jeune homme attentivement, ne sachant quoi lui répondre. Elle pourrait l'envoyer paître en lui disant de lui foutre la paix mais elle pouvait lire dans ses yeux qu'il avait souffert. Il avait l'air gentil aussi. Elle le détailla légèrement et remarqua qu'il avait de belles mèches blondes coiffées en bataille, un peu comme son Alex. Ce jeune homme était plutôt mignon. En temps normal, enfin, si elle était droguée et libre, elle l'aurait bien évidement dragué. Mais les temps changent comme on dit. Lys plaça ensuite ses yeux dans les siens et lui répondit enfin :

- " ouais c'est ça. A voir les livres dans tes mains je suppose que tu sers de larbin au vieux con ? C'est triste ça "

Lisbeth le fixait maintenant avec amusement. Elle se demandait ce que le jeune gomme avait bien pu faire pour être livrer au bibliothécaire alors qu'il faisait un temps magnifique dehors. Elle jeta ensuite un coup d'oeil sur les livres que le garçon avait posé sur la table. Il y avait de la littérature française, Baudelaire, un peu de Molière et deux livres de Zola. Voir ses livres lui rappeler sa vieille France qu'elle avait quittée il n'y a pas si longtemps. Elle se demandait qui pouvait bien lire ces livres. Elle regarda le jeune homme et lui demanda :

- " T'aurais pas une cigarette par hasard ? "

Invité

Matthew regardait toujours la jeune femme en face de lui, remarquant qu'elle essayait de se cacher le visage entre ses mains. Pourquoi ? Le jeune homme ne s'attarda pas plus que ça sur la question et baissa les yeux vers les livres. Elle avait parfaitement raison, il était le larbin du bibliothécaire. Et ça commençait à le chauffer. L'expression de son visage changea, et Matthew éprouvait à présent de la colère. C'est peut-être pour ça qu'il lui répondit sur un ton agacé.

- " Ça, ça te regarde pas. "

Il lâcha un soupir avant d'attraper dans sa sacoche un paquet de cigarettes et le lui lancer. Il se leva ensuite et prit les livres dans ses mains, les positionnant sur les étagères juste à côté de la table. Ce n'était peut-être pas leur bonne place, mais Matthew s'en foutait un peu à présent, si l'autre con lui dirait quelque chose, il ne savait pas très bien comment il allait réagir. Il se rassit ensuite en face de la jeune femme et lâcha sur un ton léger, comme si il ne s'était rien passé.

- " Excuse-moi. J'ai un sale caractère, je l'avoue. Tu t'appelle comment ? "

Matthew se massa la nuque de la paume de sa main, l'air gêné. En fait, il ne l'était pas du tout. C'était juste un air qu'il se donnait. Il soupira à nouveau, puis la regarda dans les yeux.

La voix du garçon trancha l'air rapidement. Son ton était froid et le jeune homme était visiblement en colère ce qui eut pour effet d'accentuer l'amusement de Lisbeth. Elle ne cachait plus son sourire à présent. Elle réceptionna le paquet de cigarettes et en sortit une. Elle saisit le briquet dans sa poche puis alluma sa clope. Elle tira quelques bouffées avant de relever le regard vers le garçon et de voir qu'il était levé et qu'il rangeait les livres n'importe où. Lisbeth faillit éclater de rire puis en voyant la mine contrariée du garçon, ne fit rien.

Elle le regarda s'assoir avec curiosité et se remit à sourire en l'entendant s'excuser. Ce garçon lui plaisait vraiment. Lorsqu'il s'énervait, il semblait se forcer. C'était assez marrant à voir. Lisbeth se perdit dans son regard quelques instants avant de se reprendre et de lui tendre le paquet de cigarettes. Elle faillit lui murmurer merci mais elle se retint, sans vraiment savoir pourquoi. Elle tira une nouvelle bouffée et reporta son regard sur le jeune homme.

- " Hmm ... Je m'appelle Lisbeth ... Et toi ? "

Elle profita de ce moment pour détailler légèrement le jeune homme. Il avait des traits jeunes, sûrement moins de 20 ans. Il avait un nez fin, rarement aussi fin. Une peau légèrement blanche aussi mais bien moins que celle de Lisbeth. Elle regarda aussi ses cheveux avec attention, se demandant s'il faisait exprès d'avoir l'air si décoiffé ou s'il venait juste de sortir du lit. Pour finir, elle tendit une main légèrement tremblante qui l'étonna elle même vers le jeune homme.